samedi 31 mai 2014

[Rétro-lecture] Christian Prigent, La Belle Journée (Chambelland éditeur, 1969) [2/3]

Un grand merci à Christian Prigent d'avoir pris la peine de ressaisir le texte de son premier recueil - quasiment introuvable aujourd'hui -, dans lequel il ne cite André Breton que pour mieux en prendre le contrepied, n'ayant de cesse de dégonfler les idéalismes. Avec Denis Roche, entre autres, la poésie est bel et bien devenue inadmissible : "Da ta gorge il faudra arracher ce poème poreux comme une amygdale qui t'étouffe"... C'est le moment de se rappeler une phrase de Ceux qui merdRent, située à la fin de la section sur Denis Roche : "après le congé à l'humanisme (l'inadmissibilité de la poésie), le refus de toute ligne de fuite utopique ("je n'ai rien à dire que ma violente action d'écrire"), [...] la littérature s'ouvre à la nudité insensée du monde et c'est à la fois intenable et désespérément voluptueux" (P.O.L, 1991, p. 173). /FT/




III- EXEMPLES DE FLORE



LANGUE-DE-BŒUF I

Mauve dessous ou brune
mauvaise d'être franche
et couturée cousue au tronc
blanche humide dessous

oreilles prêtes au discours
de l'arbre qui chemine
vers la déflagration

langue-de-bœuf
à l'œil de crabe
lippue tentant l'essor
mais de l'appartenance
durcie à mort

et par douleur d'être dessus
noire et fixée
brandie pour mordre
l'intolérable espace

qui blanchit
et passe








LANGUE-DE-BŒUF II

Le mufle sardonique
elle a le mufle des baleines
mais la queue où
dans la terre ou
au cœur de l'arbre
dont ploc ploc ploc goutte la lymphe
dans sa béatitude au ras de l'herbe épanouie

amphibie louche au ras de l'herbe
avec sa texture de phoque
son mufle de baleine
son blanc vidé
et cette lymphe qui blessé l'arbre
suinte du ciel
elle flanque à quelle gueule domestique
ses cinq doigts bruns palmés en phoque
en une seule épanouie béatitude
apparemment onctueuse caressante main
qui rit de peser l'air d'être sur lui de le
scier







LANGUE-DE-BŒUF III

Crêpe fluide glissante
à manches longues et évasées
seins très légèrement surbaissés
pour une meilleure visibilité
béate épanouie avec sa moue
tentant la pluie
crêpe flottante plate pleine
d'idées qui se déplient
jusqu'au cousu de la dentelle








LANGUE-DE-BŒUF IV

Crêpe fluide pleine d'idées
dont crispée la béatitude
serre les fanons de la dentelle
le poing cousu au tronc
brutal nu éclaté
dans une profusion de doigts
mais qui se palment
en noir de phoque et blanc vidé
tentant l'essor tentant l'averse
mais au poids d'air se résignant
d'être onctueuse sardonique
brandie pour mordre
l'intolérable espace








LANGUE-DE-BŒUF V

Ce poing calcul ovaire
caillou coincé qui gerce sous l'écorce
oiseau mort séquestré
machin calciné
machin calcifié
gicle et éclate
vient faire face
mais ses cinq doigts qui frappent
tout aussitôt se palment
et s'apaisent en un rire d'ongles
découragé cynique sardonique
qui pèse à son poids juste
le vent doux

l'inexorable vent








IV- L'APRES-MIDI




Fascines de feu rouge
avec le lait noir au milieu

le chanvre douloureux
d'être trop bien tressé

la haute armoire comme des fesses
le chaud dans les pierres muré

tous les cinémas sont complets
ne pas se pencher au dehors

aisselles attisées dans les heures dociles
choses très bonnes à manger

voici le doux après-midi
qui brise sa laine patiemment

dehors sur le ciment mouillé
le désir s'accroupit

pour boire










OU MIEUX

Gorgeon ou mieux goujon
goulée peut-être sanglot
de sperme ou de terreau
où nous aurions

senti si fort passer
contre sang vif
les milliers de couleuvres
la cascade des chrysanthèmes
les leucocytes

eau délectable à émouvoir
dans le verre roux
coupé contre le ciel
plein mais froid

de loups précoces
en crimes et en fourrures

comme rire
ou mieux être
bien









ASSIS

La scierie, l'assis dans
l'odorante dorée sciure
y regarde loriots bardes
l'oseille ose être treille
eau du merveilleusement bleu
acide ciel,
y songe
vents viendront, ruades
(une femme foutue, rouie, que
rouille un rêve, là)
et
la rubrique de la mort meilleure
recelée ras la poudre :

son poids parfait
parmi les poutres.








L'ETE FINISSANT

Des sacrés paquets de guêpes — rappel : l'émulsion de chardons, orties, suint, ce juillet près des cales, carcans pour les reins ruants — je guette la passe — tu guettes l'atomisation de l'essaim — nous guettons — nous guettons l'accroc satiné, la fraîche soie déchirée sur le sexe, le coin des canards enfoncé — annonce des piquetis aux joues tendues, du réveil rose-frêle — dans le guêpier bouillant, la masse obtuse des nimbus. — (Je chasse — sourire — un chaud zézayant, quatre ailes, sur ma tempe).








DERRIERE

Le sac à patates
l'irrespirable trou
la terreuse toile à trous
bourrée de terre

pousse dans le tas

j'y mets le nez
om les cloportes plats
tapent dans le tas

tas de morts
aux narines sans fond
vigueur — croûtes —
reliefs où bat le sang
la terre drue

peut-être








FEMME

La lavande des serviettes
qui sent ton cou
qu'elle te soit douce
femme croisée
sacrée rousse

voilà le mot lâché
femme croisée
sacrée trompette

et l'eau qui vêle
le ciel qui poivre
tout ça qui ronge

ça fait beau temps
quand tu déplies
tes sacrées hanches

et ça rutile...


DONC...

jeudi 22 mai 2014

[Rétro-lecture] Christian Prigent, La Belle Journée (Chambelland éditeur, 1969) [1/3]

Un grand merci à Christian Prigent d'avoir pris la peine de ressaisir le texte de son premier recueil - quasiment introuvable aujourd'hui -, dans lequel il ne cite André Breton que pour mieux en prendre le contrepied, n'ayant de cesse de dégonfler les idéalismes. Avec Denis Roche, entre autres, la poésie est bel et bien devenue inadmissible : "Da ta gorge il faudra arracher ce poème poreux comme une amygdale qui t'étouffe"... C'est le moment de se rappeler une phrase de Ceux qui merdRent, située à la fin de la section sur Denis Roche : "après le congé à l'humanisme (l'inadmissibilité de la poésie), le refus de toute ligne de fuite utopique ("je n'ai rien à dire que ma violente action d'écrire"), [...] la littérature s'ouvre à la nudité insensée du monde et c'est à la fois intenable et désespérément voluptueux" (P.O.L, 1991, p. 173). /FT/




Qui étions-nous devant la
réalité, cette réalité que je
sais maintenant couchée aux
pieds de Nadja, comme un
chien fourbe ?

André Breton









(à la fin
tu vis dans l'égouttoir
tu causes toujours
dans un trou...)












I· LE MATIN



Ce matin la vaisselle
déjeuné frotté l'œil
lavé les crocs


l'absence de quoi
cramoisie
simples pourtant les apparences


tête baissée dans la malveillante journée
ses cornes contre une brume palpitante
pourtant l'air clair au-dessus
tissé d'oiseaux
complètement dans moi
complètement dans moi
le poing noué au diaphragme
lessive faite
morsure un peu aux hanches
ne pas laisser le gaz ouvert
seulement 







QUINZIEME ETAGE

A la citadelle lisse au froid pur
contre être peu à peu acculé
ce sont matrones chaises
elles rotulent les murs

coup de poing de l'astre dur
dans le fouillis des tergiversations
l'heure plate bleuit
au-dessus du courage
horizontal

et si ça penche
et si ça perce
il y a la chaise
au cul carré
le lit sans tête

la suie comme du ciel
éboulé







FAILLE

En entrant m'ont poursuivi
ciel pied de feuilles
et sa main
la lampe lime un groin
ça n'est pas lui qui fouille
mais le tain
regard au miroir mauve
balcon déjà
chute livide dans les branches
un noyé qui entrait
dans la brouette d'ombres
où baroudaient ses yeux







De fraîches vaches à la fenêtre
et la fragile Braille de dix hêtres
l'ancre du sang salaud
qui tombe dès le matin

de pauvres liens. Ombres
derrière. Les tentatives
de la faim. Le biais des corps.

Des corps coincés contre les gestes
et tout démarre.
Dans le lit triste, chaude encore
et traquée par l'eau claire
elle remet sa mèche
contre le bois bruyant.





Jointe à la flache
jointe la vache
et la charpioule
des bas nuages
(ils sont en suie)

mais entre ça c'est nous
coincés ta (bouche ?) petite
boule d'ache franche
les masques souples et les rires
qui cirent les cuirs où l'on
se pose doucement —

juste au-dessus de la ville
ratelier d'œillades bleues
qui braille







LA CHAISE

La chaise est là
et quoi dessus

tu la connais
la paille et toi
ça se ressemble

(le même rabot
des reins aux angles)

la chaise est là
bout dans le cuir
où l'ombre cuit

ne bouge pas
la paille et toi
cadrant ma tête

et rien ne tombe







BLASON URBAIN

Le blason du blasphème
cette nidification
des motocyclettes
les maigres jeunes gens
sous la lumière terroriste

fond de gueule grêlé bleu
où se taire est supplice
au neuvième le sang
l'oiseau au naturel

qui veulent vivre
qui veulent vivre
dans la bestiale casemate
ville de sable d'yeux
de rixes

silence où est la place
la bauge convoitée
la grandissure dans l'écrin

où est dormir
et le dernier délice
ce chahut ravalé
avec les yeux sauvages
des femmes à nos trousses







PASSANTES

Elles dix-neuf ans chandails roses passent
avec leurs petits seins en goulots de bouteille
ta jupe n'a pas ce rire ébréché
ce regard de rosier brûlé vif

quand tu rentres ta robe
me tombe dans les bras
mais je n'en parle pas

elles dix-neuf ans pointues et rouges passent
un peu de sueur comme une sauge au creux des bras
qui me fait mordre
quand j'attends

mais voici qu'elles
dix-neuf ans passent
elles ne sont
jamais si belles que toi ma proche
ma lointaine qui ne t'éventres
qu'au soleil
mon silence apparu au matin
mon couteau de seins frais quand tu passes

et toujours étant sauvage
j'hésite et je me terre
dans ma vue







SALE SITUATION

pour Yann Hamonet

Encore un robinet qui grince
personne pour le fermer
c'est la pression
en bas la noyade
en haut le cassage de gueule
comptez pas sur moi

sale situation

changer de vitesse comment
dérailleur sauté sexe diaphragmé
bouche saignée pissant
dans la coque vide des sourires

flancher hurler passer se
taire
bordels casernes facultés
eau courant à l'étage
la pente effroyable des reins
s'effondre dans l'eau muette
du désir

doucement les intestins
doucement les examens
doucement les percolateurs
doucement les avions
silence au fond :

encore un vieux qui miaule
personne pour le crever
c'est la pitié
en haut le ciel
en bas le sang
comptez pas sur moi

SALE SITUATION







TIRE LES RIDEAUX

pour Roland


Moto rangée dans l'appentis
landau aussi
parfait correct

remonte le boulevard
plutôt par le ciel
pas de motards
on y est bien

ne mange pas la cellophane mitoyenne
dors avec une femme sans visage
voilà la marge difficile

parfait correct
fiches remplies
urines claires

rideaux tirés tirés
ah mais les yeux cernés
des automobiles de sang
ou bien dans les oreilles le
tabac qui fuit

le froid qui passe
le trou qui tue
la femme qui ne veut pas
c'est facile et bref

pour que parfait
correct
étincelles
pendules

tous les obscènes
yeux yeux yeux
nous mordent





A SE TORDRE

Un chien perce la nuit
et dans ce trou toute la terre
et la cervelle

chauffée à blanc

quatre murs barbelés
ça craque de partout
voyez fleurir les vitres
ouvrez vos lèvres femmes un peu
que le jour vienne

la pluie sur la verrière
le chiot mange sa mère
la chair assiège l'ombre
à se faire mal
effectivement

voyez s'emblaver les aisselles
le bruit des seaux dans les matrices
chasse les mouches
ouvrez vos jambes qu'on rassemble
nos chaleurs séparées

un cri tordait un chien
et dans ce nœud la vie
belle bête en gésine
et révulsée







GROS TEMPS

Goutte d'eau grosse
de branches d'arbres
puis un serpent
qui nous menace

entre les deux
hommes terrés

pleine déconfiture
(la peau du ciel
chienne sensuelle
trop sûre d'elle
et de nous tuer)

où notre sang
cessera-t-il
du moins s'il cesse

dans l'œil jaloux
dans l'œil tordu
dans l'œil perdu
d'être pointu

gros de visions
empoisonnées
gros de désirs
car il demande

le rapt d'un roi

qui soit pendu
derrière la vue







SORTE DE GENE

Les yeux devenus minces
par la méthode des alibis

fabricants d'herbes
mâcheurs de vent

dans une fantastique robe blanche
une femme à la belle bouche rose

sur toutes les monnaies
les témoins politiques
les violences reconnues

la guerre lettre d'amour
entre les jambes passées
comme un fouillis de jambes prêtes

c'est inquiétant comme
un chien dans un jeu d'hommes

le rire même plus humain
le vieux rêve très frais
jette ses petits pavés dans nos
bouches tristes comme la pluie

dans une fantastique robe blanche
la femme convoitée
et le silence partagé

pat différentes vidanges sanglantes

souvent
le Viet Nam me gêne fixement





II- EXEMPLES DE FAUNE


PORTRAIT DE L'ARTISTE

C'est un beau fruit de clapier. Dos de boule et guettant la carotte. Sachant tout de la trique et de l'enclos. Mais de la femme il ne sait rien, cet empire des coïncidences, de la fragrance de laquelle la radieuse propreté, sang de matrice ou ramassis d'ordures, le bâillonne et l'attise. Il se demande parfois pourquoi ce blanc de peau après la jarretière et quels oiseaux à tuer fouillent au nid des cuisses. Il s'aveugle et ricane. Il se lave et calcule. Il se rase et s'adapte à sa forcenerie de mâle. Il deviendra flic ou boucher. Et sa femme cachera ses règles, car il en rit.




DROLE DE FEMME

Elle met mon sexe dans le cendrier, dit-elle, et elle l'écrase. Et, pendant ce temps, comme tous les matins, je descends les boîtes en fer er je remonte. Elle s'acharne sur le pilon. Elle n'en vient pas à bout et comme je l'observe sans fatuité, s'énerve. Que faire ? Surtout que cette scène est habituelle. Le sien, c'est du mil, une bouche de mil depuis toujours écrasée, qu'elle meurtrit quand elle marche et qu'elle le sente la rend folle, folle de mordre, de malaxer. Ainsi fait-elle, injectée et hilare, s'acharnant sur ce que de moi elle n'a pas encore soumis à l'infâme rythmique du travail. Et je l'observe. Frêle, j'attends. Voulant dormir, surtout. Etre au frais. Dormir.




DANS L'ARMOIRE

... elle se livre, dans le placard, à des activités sensuelles. Sent les chemises, met du sein sur les draps, moud la craie lavandière où plusieurs poumons se gorgent d'une petite musique affriolante. Et si la guillotine le soir tombe, le sang bout, le bois tremble, elle affleure entre le moût des poutres et les taies sèches. Derrière le miroir qui l'imagine carnivore, elle s'abouche à la sève chenue, lèvres menues au merisier livrées. Ses phalanges forment à présent le masque de Lucrèce, le fard de Mélusine. Plus qu'un cynisme double, son être monte à sa mâchoire. Elle se mord au secret prédateur, encastrée dans l'armoire des bâillons, des linges louches. La peau passée au jute, le cerveau dans les ongles, maillée de mouches mutilées, elle se livre avide aux minuties, ferronneries de chair exacerbée par la morsure, en quoi le temps se noue, souffle tendu, dans deux regards au tain, tout alentour éteint...





LA SALE BETE A CHABERT

La queue empirouillée entre les jambes, la sale bête frauduleuse s'approche, cherchant la faille. Ne pas s'y laisser prendre. La savate, plutôt. En guise d'adjectif, simplement un peu de terre éboulée. La sale bête vicieuse et souple, la gueule en coin. Ni roquet, ni cabot, sale bête qui colle et tache, sale putain, sale cancer. Comme presque tout le doux, le gras, le suave. A se faire mal voir, la bête malpropre, elle a un peu grandi et sait s'y prendre. Et voici qu'une huileuse injure dépare notre plastron, que les puces dansent et qu'un voile d'ailes noires lèche nos épaules rentrées compactes contre un mur mou de sales bêtes affables qui mendient et jappent dans nos jambes où patauger, couler, se marcher dedans du matin au soir, être sa sale bête à soi sucrée et fourbe, son chien aux yeux rouges, cette peau de Nessus sui rive à sa lèpre chacun, la trouille aux reins.







LE CHEVAL

Je sais bien que si j'approche il me mordra. Il rit déjà. Il est comme une grue. Debout et de grande envergure. Et le ciel fonce par tous ses interstices : gueule, oreilles, nuages de la transpiration. On ne sait quelle lévitation met ses sabots assez lopin au-dessus du fumier. La menace est luisante. Tout est lustré et pète d'orgueil. Comme la flèche du taureau, écorchée. Et les dents prêtes, le voilà qui me guette. Il me scie au niveau du bassin et tout le ciel me passe dans le corps avec sa paille et ses moustiques. Je suis de chaque côté de la bête qui partage la chaux dans l'écurie touffue. Qui est debout et qui tombe du toit, d'un coup, sur quatre pattes, pesante. Approche un peu. Mais on ne sait quelle lévitation met ses sabots assez loin du fumier. Vraiment près des tibias.







LES VACHES

Les vaches qui savent vivre on voit la terre qui monte de leur mufle on voit la terre et ça retombe.
On voit le ciel qui se caresse dans leurs cornes on voit le ciel et ça s'en va.
On voit le poil et l'herbe ensemble on voit le poil et ça étouffe.
On voit la sueur et la lumière on voit la sueur on ne sait pas ou la lumière quelle différence.
On passe entre leurs dents plus minces que leur herbe plus sauvages que l'eau
On passe dans leurs yeux comme du sang craché comme du temps battu que le vent mêle aux pommes
Elles s'appellent pommes elles s'appellent chair s'appellent chair mêlée au soc s'appellent soleil sommeil soleil
Regardent lentes lentes avec la terre obtuse avec l'herbe sagace regardent là devant
le nerf idiot qui fonce fonce fonce
et pue








POEME-AUTO

De ta gorge il faudra arracher ce poème poreux comme une amygdale qui t'étouffe. A chaque fois qu'en plein soleil sur une route retirée, tu prends dans la tête un comique épouvantail agonisant, saccagé dans la tôle ou la sirène des glaces. Chaque giclée de mort te bonde de ta propre odeur de mort. Elle te gangrène jusqu'au défaut du coude. Le cylindre de pluie, de neige, de fureurs te hante et jappe comme chienne entre les mots. Crache. Crache ou crève. Fonce dans le mutisme qui t'aspire. Appuie.